Cannes 2024 : un festival sous le signe de #MeToo
Le 77e Festival de Cannes s’ouvre ce mardi avec la vague #MeToo en toile de fond et un défilé de stars sur le tapis rouge. Parmi elles, Meryl Streep, figure légendaire du cinéma. La question des violences sexuelles occupe une place centrale, sept ans après la chute de Harvey Weinstein et cinq mois après la prise de parole de Judith Godrèche en France.
L’actrice accuse Benoît Jacquot et Jacques Doillon de l’avoir violée durant son adolescence. Mercredi, elle présentera Moi aussi, un court métrage en hommage aux victimes. « Judith Godrèche transforme son combat en un geste cinématographique, pas en une lutte personnelle », a souligné Thierry Frémaux, délégué général du Festival, mardi sur France Inter.
Cet événement intervient alors que 100 personnalités, dont Isabelle Adjani, Emmanuelle Béart et Juliette Binoche, demandent une loi intégrale contre les violences sexuelles. « Nos prises de parole #MeToo ont révélé une réalité longtemps niée : ces violences sont systémiques, pas exceptionnelles. Mais qui nous écoute vraiment ? », questionne une tribune publiée mardi sur Le Monde.
Une cérémonie engagée
À Cannes, Camille Cottin, maîtresse de cérémonie, promet de ne pas occulter « les remises en question profondes » du cinéma. « Des voix fortes s’exprimeront. Des femmes puissantes prendront la parole. Elles seront au cœur de cette cérémonie », a-t-elle déclaré à l’AFP.
Si aucune personnalité invitée ne fait l’objet d’accusations publiques, neuf femmes affirment avoir été victimes de violences de la part du producteur Alain Sarde. Connu pour ses collaborations avec Bertrand Tavernier et Jean-Luc Godard, il est visé par des accusations de viols et d’agressions sexuelles révélées lundi par Elle.
Le Festival de Cannes et Mediapart démentent cependant l’existence d’une prétendue « liste » de personnalités mises en cause. « Il n’y a pas deux réalités distinctes : le Festival et ce qui se passe autour », affirme Camille Cottin. Elle évoque aussi le mouvement des travailleurs précaires du Festival, qui protestent contre la réforme de l’assurance chômage.
Meryl Streep, invitée d’honneur
La soirée d’ouverture rendra hommage à Meryl Streep, 74 ans, qui recevra une Palme d’or d’honneur. Rare sur la Croisette, l’actrice aux 21 nominations aux Oscars a marqué le cinéma avec Le choix de Sophie (1982), Sur la route de Madison (1995) et Le Diable s’habille en Prada (2006).
Elle retrouvera Greta Gerwig, qui l’avait dirigée dans Les filles du docteur March (2019). Depuis, la réalisatrice est devenue la première femme à franchir le milliard de dollars de recettes avec Barbie. Ce mardi, elle fera ses premiers pas en tant que présidente du jury cannois, symbole des changements à l’œuvre dans le 7e art.
Côté glamour, elle partagera le tapis rouge avec Omar Sy, Eva Green et Lily Gladstone, membres du jury. Lundi soir, ils ont inauguré le festival avec un dîner rose bonbon en hommage à Barbie, préparé par le chef Jean Imbert.
Un festival entre cinéma et enjeux politiques
Les stars du film d’ouverture, Le deuxième acte, les rejoindront. Quentin Dupieux y réunit Léa Seydoux, Louis Garrel, Vincent Lindon et Raphaël Quenard dans une comédie acide sur le politiquement correct et l’ego des acteurs.
Enfin, la cérémonie d’ouverture mettra en lumière une venue inattendue : celle du cinéaste iranien Mohammad Rasoulof. Condamné à cinq ans de prison, il a réussi à fuir son pays. « Le ministère des Affaires étrangères nous aide à sécuriser son arrivée à Cannes. Nous espérons projeter son film en sa présence », a affirmé Thierry Frémaux.
Son long-métrage, The Seed of the Sacred Fig, sera projeté le 24 mai, dernier jour de la compétition, juste avant l’annonce du palmarès.